Lucide :
Lucide
je sais les mots qui viennent de civilisation
je sais les labyrinthes dualistes et réductionnistes
Je sais les mots qui viennent d'évidence
je sais le piège des attitudes naturelles en langue maternelle.
Je connais les entraves.
Mais qu'importe !
Aux mots insufflés à la chute
s'effacent les mots qui viennent de civilisation
s'effacent les mots qui viennent d'évidence
s'effacent les mots qui viennent d'entrave.
Aux savoirs anciens l'évidence disait :
Il y a la réalité
elle se perçoit, s'invente, s'imagine ou s'ignore
je suis le sujet de la réalité
celui qui perçoit, invente, imagine ou ignore.
Le cognitif, le psychologique, l'émotionnel
sont ma conscience, ma pensée, mes cognitions.
Cela vient d'un système nerveux qui traite de l'information.
Mon esprit émerge de la complexité.
Du vécu d’Écho-clair-émue
du vécu de Sensible et dépouillée
Lucide, j'écoute les mots.
Aux mots insufflés à la chute j’entends :
Ainsi partageant un regard sur le monde
apparaît la réalité et sa certitude
Ainsi partageant un regard sur le monde
viennent des mots qui la nomme
je me souviens des gestes faisant exister la réalité.
Aux mots insufflés à la chute j’entends :
Ainsi désignant la réalité
je suis celui qui la désigne
ainsi je jette sous moi même un fondement.
je me suis découvert comme créant une réalité
je suis apparu, faisant ce qu'il faut pour être sujet de moi même
je me souviens des gestes faisant exister le sujet.
Aux mots insufflés à la chute j’entends :
Ainsi faisant narration d'une création
j'apparais narrateur de la création
ainsi personnage de cette histoire
je suis le nommé du conte des origines
conteur démiurge faisant l'histoire et y apparaissant
je me souviens des gestes faisant apparaître l'histoire.
Aux mots insufflés à la chute j’entends :
Ainsi faisant géographie du monde
j'apparais géographe surplombant le monde
je vois la réalité selon des points de vues
je me souviens des gestes faisant exister les géographies.
Aux mots insufflés à la chute j’entends :
Ainsi édifiant des enceintes et des frontières
faisant des dedans et des dehors
j'apparais architecte édifiant son monde
séparant ceux de la cité et les étrangers
je me souviens des gestes faisant exister les limites.
Aux mots insufflés à la chute j’entends :
Ainsi dialoguant avec les mondes invisibles
j'apparais chamane reliant les mondes
Au delà de la réalité je révèle l'inconnu
je te dirais aussi l'indicible
je me souviens des gestes faisant exister l'invisible.
Aux mots insufflés à la chute j’entends :
Ainsi te dessinant dans la perfection
dans la perfection dessiné je suis l'anatomiste
je vois la réalité du corps et des substances
je comprend les mécanismes et les articulations
je me souviens des gestes faisant exister l'anatomie.
Aux mots insufflés à la chute j’entends :
Ainsi suivant le fil de mes pensées
vient que je sache la danse
et que d'esprit je suive les enchaînements
et que d'esprit je sois sujet qui s'observe
je me souviens des gestes faisant exister extérieur à moi-même.
Danseur exigeant, au laboratoire des danses
jouant des circonstances qui défont les évidences
s'explorent en aller retour les gestes, leurs vécus
et les mots qui les nomment.
Quittant l'évidence de la réalité je dis :
Par des actes minorés se faisant, vient une réalité
un monde apparaît
moi-même apparu au monde
certain d'être sujet
certain de la réalité
à distance du monde
en être le sujet
en être l'origine.
Savoir.
Lucide
je compile les expériences.
Lucide
j'accumule les mots
lucides
déjouant les évidences.
Désirante :
Je n'ignore pas de quel dessin je suis, je ne peux l'ignorer
toute ma difficulté est le figé du dessin
bien plus difficile que de renoncer au savoirs et aux évidences
le figé du dessin est tenace
et abandonner l'évidence de la réalité est rare.
Il y a mes entraves
cette façon d'être à la réalité
sans plus la voir apparaître
comme si elle était là de toute éternité
et moi-même au labyrinthe.
Ayant retrouvé l'humaine réalité
et toujours me cherchant
encore je reprends l'escalier d'Eurydice
ainsi aux années et chaque jour
à nouveau du mieux que je puisse
répétant l'exercice
je déjoue les évidences.
Et parfois au repos d'un soir
je m'enfonce dans la nuit
sans plus rien qui ne se dise.