La clameur :
Tu le sais bien
peuple de ce récit
que maintenant vient la chute
Ivres de recommencement :
Quelque soit le labyrinthe et bien que clos
Quelque-soit l'errance et son éternité
quelque-soit le figé du dessin
toujours les vagues viennent en succession de vagues
et quelque-soit sa pierre ou quelque-soit son sable
le rivage fluctue et les livres se renouvellent.
D'enfances nouvelles, de danses nouvelles, d'histoires nouvelles.
Car toujours au loin
plus sobre que l'anéantissement
une pulsation veille.
Au ressacs des souffles, éternité sans cesse recommencée
toujours mes mots reviennent comme en vagues
renouveler le rivage où ils s'épuisent et se perdent.
Et toujours un souffle me prend et inlassablement revient
offrant une nouvelle fois où cela puisse advenir.
Car toujours au loin
plus sobre que l'anéantissement
une pulsation veille.
Continuant d'exister d'inextinguible renouvellement
comme les vagues se perdant au rivage
redessinent sans cesse des apparences nouvelles
encore revient un presque rien de geste, un presque rien de danse
même éperdue, même endormi revient ce geste d'ouvrir
qui tracent aux prochains gestes des rivages nouveaux.
Car toujours au loin
plus sobre que l'anéantissement
une pulsation veille.
Je me suis confié aux vagues et aux recommencements
comme un jeu sans cesse jouer
joueur, se déjouer de soi-même.
Impossible de rester dupe.
Se mettre en jeu, recommencer
avec courage jouer l'inconvenance
puis à l'inconcevable jouer éperdument.
Car toujours au loin
plus sobre que l'anéantissement
une pulsation veille.
Du vivant, de l'animal, de l'humain et du monde
de tout, et autant qu'il le faut, je fais hypothèse.
Faire hypothèse de soi même
Faire hypothèse de tout et en jouer.
Se mettre en jeu pour chercher ses mots.
Puis d'humeur joueuse recommencer.
Car toujours au loin
plus sobre que l'anéantissement
une pulsation veille.
Au rire des exaltations
mais néanmoins révolté
en perpétuel recommencements
de ses gestes ivres des innocences
un disparu, d'humeur joueuse, fragile comme un oiseau
se tient au fil des mots en équilibres toujours recommencés.
Car toujours au loin
plus sobre que l'anéantissement
une pulsation veille.
Je cherche mes mots
faisant révolte aux universités.
Je cherche à l'avant du mot
faisant révolte aux paroles usées.
Je cherche tout autant que j'invente un verbe envahissant
simple mot poser sur un geste juste
et pourtant frisson buissonnant
faisant révolte à l'injustice du rien.
De recommencement en révolte
éclore des labyrinthes
comme la première fois.
D'ardente naïveté
Car toujours au loin
plus sobre que l'anéantissement
une pulsation veille.
D' inextinguible désir venu d'outre nuit
toujours revient « Pourquoi quelqu'un plutôt que rien ? ».
D'une question, déjouée en un seul geste
inlassablement, aux jeux des miroirs
deux visages irrigués de souffles
insufflent l'un à l'autre la naissance du sens.
La rencontre est à l'envers du rien.
Car toujours au loin
plus sobre que l'anéantissement
une pulsation veille.
D'éternel recommencement
comme d'être éternellement au début de soi même
éperdument enfant et néanmoins d'esprit joueur
au bord du précipice de l'inadvenu surplombant le néant
d'une insouciance joueuse et d'ignorance
au tournoiement des révoltes risquant la chute au précipice
vint une volte unique et radicale.
La clameur :
Tu le sais bien
peuple de ce récit
que maintenant vient la chute
Voltigeur :
C'est étrange
de texture, de matière, de substance
je chavire.
C'est étrange, mon vêtu claque comme voile de navire dans la tempête.(mon apparence se déchire)
Être originaire d'argile
et dans un claquement
devenir pierre figée.
Être originaire de pierre
et dans un craquement
de pierre devenir sable.
Et de crissement de sable
que se fasse poussière.
Et d'argile, de pierre, de sable ou de poussière
trouvant geste en cette nouvelle origine
comme aux métamorphoses d'Ovide
viennent gestes d'argile, de pierre, de sable ou de poussière.
c'est étrange, ce crissement vif des nerfs.(métamorphose)
Une nuit se sentir grand ou petit
et que de ce senti là ainsi je courre
ou qu'aérienne je sois bercée de vent
et qu'ainsi je dorme
ou que d'un rêve puissant venant de ma lignée
je sois comme le frétillant d'un poisson
et qu'ainsi sans qu'il puisse en être autrement
je courre à ta rencontre
mais qu'un matin courant ainsi, je sois saisi de branchage
et heureux d'équilibre comme écureuil, je continue de courir.
Ainsi je cours à m'en couvrir d'écume
comme Alcyoné jaillissant du sable
qui d'un cri soudain s'envole
mais y laissant des larmes.
C'est étrange, cette distorsion des textures. (l'oubli des substances)
Être dessin, la fureur de Michel-Angelo
et que mes gestes s'organisent comme en furie
et qu'il puisse advenir que le cri devienne silence
et que mon prochain geste
comme d'un autre dessin naisse de silence.
Puis me Jetant aux oublis ou bien sous moi-même
dans un immense silence traversant le vide
étant d'esprit et de corps en civilisation ancienne
étant de cerveau, squelette ou muscle en 20ième siècle
quelque soit la matière que je fus en toute civilisation
que toujours elle se dissolve
que je sois transparence comme le vent
et que dans la chute tournoyant
le monde se renversant
mon geste vienne d'envol.
C'est étrange, cette ciselure aveuglante des chimies.
A la clarté foudroyante du souvenir, j'entends :
« un geste comme la première fois !».
A ces mots ouvrant grands les yeux
dans la chute, de destin basculant
advint cette autre texture qui me fit courageux.
Alors dressé en mes mots
comme un dessin dont le papier se défait
de l'articulé d'un souffle attendrissant
un conte m'emporta autrement que jamais je ne fus porté.
D'ivresse commença un murmure
puis l'oxygène fit un chaos de mots incandescents.
Le poids des substances n'est plus ce qui m'arrime.
De mots consumés en sublimation de chimiste
de ce que je fus, plus rien ne subsiste.
Chavirer des ancrages profonds, de tout ce que je fus
un renversement suspensif
une catastrophe de René Thom.
C'est étrange, ce magnétisme irrésistible.
Oui ! toujours à l'histoire chahutée
des hauteurs incertaines
toujours n'advint que de tomber en soi
mais d'une autre texture que celle dont j'étais l'instant d'avant
d'une autre texture vint un geste
comme celui qu'inlassablement je faisais
mais désormais mon geste autrement se fait.
D'une autre origine tissant son texte
le mot d'un geste comme la première fois.
C'est étrange, cette transparence du regard.
Au bord du gouffre renversé
pétrissant des argiles venant du vide
je fus saisi de liberté.
Extirpé d'absence.
Libre de voler à des ailleurs et autrement.
Libre d'enfance, d'école ou de lignée.
Simplement devenu souffle
évidemment, devenu souffle.
Quoi d'autre aurait il pu advenir ?