E128 | Écho Émues

Souffleur :

J'attends les mots qui viendront à moi
par absorption, ingestion, digestion, assimilation
des mots qui s'insufflent d'haleine à haleine.
Je fais silence avec méthode plutôt que de parler pour ne rien dire.
Mon apaisement aux explications illusoires serait un apaisement illusoire.

J'attends les mots qui viendront à moi.
J'attends ce poème me faisant apparaître
un verbe créateur me donnant chair.
Je garde la page blanche plutôt que d'écrire pour ne rien dire.
Mon apaisement aux explications illusoires serait un apaisement illusoire.

Longtemps j'écoute.
Lavée de tous les mots anciens
j'espère des mots créateurs
et que j'en sois créature.

Tu diras juste ce qu'il faut de mots
et j'en serais envahi.

Prudence :

Sans regard, au tactile du monde
je me souviens j'ai lu tous les livres.
Je me rappelle les prudences.
Je me rappelle les sagesses
philosophies, poésies ou sciences.

Sans regard, au tactile du monde
je vais aux longues épistémologies.

Désormais à prudence de peau
touchant le monde, je questionne :
Comment le mot fait-il sens ?
Comment faire apparaître celle qui sait ?

Si d'y voir avec des yeux n'y suffit pas
si de danser des gestes ne suffit pas
désormais je cherche les mots qui vaillent
et quelqu'un en parole.

Prudence :

Sans regard, dans le ruissellement du monde
je me souviens j'ai lu tous les livres.
Je me rappelle les prudences.
Je me rappelle les sagesses
philosophies, poésies ou sciences.

De patiente écoute
attentive et prudente
je laisse le temps emporter les mots inutiles.

Désormais à la prudence des eaux
plongeant au monde je questionne :
Comment le mot fait-il sens ?
Comment faire apparaître celle qui sait ?

Si d'y voir avec des yeux n'y suffit pas
si de danser des gestes ne suffit pas
désormais je cherche les mots qui vaillent
et quelqu'un en parole.

Prudence :

Sans regard, gouttant le monde
je me souviens, j'ai lu tous les livres.
Je me rappelle les prudences.
Je me rappelle les sagesses
philosophies, poésies ou sciences.

Désormais se taire et mâcher des paroles sans voix.
Faire murmure de geste, longtemps
pour qu'éclose un seul mot.
Faire silence longtemps
pour savourer l'instant du mots.

Désormais ne pas être déjà là avant le mot.
Aux mots du poète qui œuvre à l'humain
questionnant, je plonge en moi :
Comment le mot fait-il sens ?
Comment faire apparaître celle qui sait ?

Si d'y voir avec des yeux n'y suffit pas
si de danser des gestes ne suffit pas
désormais j'explore à l'instant du mot
l'apparition du sujet.

Nocher des sapiences :

Pour comprendre l'humain
trouver les mots qui vaillent
qui viennent de prudence

Nocher des sapiences
aux bibliothèques des prudences
gardien des livres innombrables
je me souviens des livres faisant école
je me souviens des savoirs d'universités.

Évocation de Jean François Billeter, commentant les sagesses :
Et s'il y avait moins à expliquer.

Évocation de Gilbert Ryle, réfléchissant aux consciences :
et s'il n'y avait rien à expliquer.

Évocation d’Éthologie, seulement observant :
et s'il suffisait de nommer.

Paroles choisies parmi les paroles de ce temps.